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L’objet de cette conférence est de décrypter les politiques gouvernementales élaborées envers le culte musulman depuis l’époque coloniale jusqu’à nos jours, à partir de l’identification et de l’analyse des diverses logiques d’action qui ont contribué à l’inscription durable sur l’agenda gouvernemental de la religion musulmane et de son statut social dans l’hexagone .
Par logiques de gouvernement, il convient d’entendre d’abord les stratégies d’intervention déployées par l’acteur étatique aussi bien hier en direction des autorités et des institutions musulmanes des territoires colonisés, qu’actuellement envers les organisations, les fédérations, les communautés organisées de fidèles musulmans dans l’hexagone.
Mais il nous faudra ensuite prendre en compte la façon dont celles-ci vont se décliner au travers de discours, de représentations plus ou moins stéréotypées de l’islam, et trouver à se concrétiser dans la mise en place de dispositifs institutionnels (organes représentatifs, vote de lois, injonctions à produire un islam officiel…), sans perdre de vue, les finalités poursuivies par les autorités françaises (administrative, sécuritaire, réforme…). Finalités énoncées, ou simplement suggérées, qui vont influer durablement sur la façon dont vont s’agencer les rapports entre les pouvoirs publics et l’islam, et impacter le quotidien des musulmans.
Dans le processus d’intervention de la puissance publique envers la religion musulmane, des constantes historiques, des lignes de continuité qui relient le présent au passé sont perceptibles. Cette approche empruntée à la sociologie historique du politique permet de lire le présent sans perdre de vue le poids structurant du passé en ce qui concerne les interactions entre religion et État, et l’islam tout particulièrement.
Mais il nous appartiendra, également, d’intégrer dans notre analyse, sinon des ruptures franches intervenues en la matière, en tout cas, des variations dans leur mode d’expression, sans oublier que de nouvelles formes de redéploiement de l’action étatique envers le culte musulman, ses responsables, et ses courants religieux, sont apparues. Ces inflexions et l’émergence de nouvelles phases dans le mode de gouvernance de l’islam font largement échos à l’affirmation de nouveaux paradigmes dans la façon dont l’État entend réguler sui generis la question religieuse, comme elles semblent dépendantes d’un climat particulièrement anxiogène envers l’islam, dont les attentats sont une des manifestations, mais sans oublier non plus certaines tendances à vouloir faire le procès à charge systématique de l’islam.
Ces logiques qui témoignent de la diversité des angles d’intervention de la puissance publique, comme des outils mis en œuvre, sont autant de modes et de manières différents de légitimer le volontarisme dont ne cesse de faire preuve les pouvoirs publics envers le fait musulman.
Elles révèlent également que dans ce processus de gouvernement de l’islam, l’État n’est pas seul à la manœuvre. Il peut compter sur l’apport d’experts en matière de questions islamiques, et sur certains acteurs de l’islam organisé en France, souvent prompts à rechercher les faveurs des représentants de l’État, à se conformer aux injonctions des pouvoirs publics, espérant que de leur loyalisme affirmé, découle la reconnaissance de leur légitimité à incarner l’islam de France.
Directeur de recherche au CNRS, membre du laboratoire Groupe Sociétés, Religions et Laïcités (UMR 8582 PSL Campus Condorcet) et dirige le Certificat Pluralité religieuse, Droit, Laïcité et Sociétés à Sciences Po Aix, où il dispense notamment un enseignement sur la sociologie des religions en contexte de sécularisation avancée.
Ses recherches portent sur la gouvernance du religieux dans les sociétés contemporaines, et de l’islam plus particulièrement. Ses dernières publications sont centrées sur l’analyse des diverses modalités de gouvernance de l’islam en France (organisation du culte, formation des imâms, législations encadrant la visibilité publique de l’islam…). Il s’intéresse par ailleurs aux formes contemporaines de mobilisation et de commémorations civiles se réclamant d’une laïcité militante (Franc-maçonnerie libérale, Libre Pensée…).
Sélection de publications :
Il a par ailleurs réalisé diverses contributions dans les ouvrages collectifs suivants :